En fait, on ne peut pas en vouloir aux institutions qui suivent la logique de ce qui est inscrit dans leur logiciel...Mais on peut en vouloir à toutes les instances qui, témoins de ces logiques, journalistes, politiques, syndicalistes même, intellectuels de tous poils, ne les passent pas au tamis de la critique ( voire taisent ce qui se passe, comme ça a été la cas pendant un temps dans les médias français).
Les français ne sont pas sourds. Contrairement à ce que certains pensent, ce ne sont pas des veaux. Moi-même j'en ai été surprise en mai dernier quand j'avais entendu plusieurs fois au fil des micro-trottoirs faits à l'occasion des présidentielles tel ou tel rappeler que N. sarkozy avait fait passer derrière le dos du peuple ce que celui-ci avait très fermement refusé en 2005, le "traité constitutionnel européen" rebaptisé "traité simplifié".
Les français entendent tout et retiennent tout ! Surtout quand on conchie la souveraineté nationale, y compris quand elle n'est pas la leur. Or l'UE, après l'affaire chypriote, plus que jamais sera vue pour ce qu'elle est : un monstre ! Quousque tandem abutere, Europa? A quelle misère conduiras-tu les peuples? Les Grecs, les Chypriotes... Qui d'autres?
En France, d'audible, seule Marine Le Pen, en embuscade, remet clairement en cause l'Union Européenne, remet en cause libre échange. Nul besoin pour elle de parler. Les médias peuvent ne pas l'inviter. La dégradation de la situation, chaque jour un peu plus, ici ou ailleurs, travaille en son sens. Pendant ce temps, la Gauche, y compris le Front de Gauche, ne remet pas en cause "le cadre", comme le dit si justement Frédéric Lordon - méconnaissant que, cette fois-ci, la prochaine fois, il n'y aura pas de "sursaut républicain", ce qui est une évidence désormais pour qui sait tendre l'oreille.
Il faudrait relire Marc Bloch et son Etrange défaite, texte écrit au coeur de la tourmente de 1940, témoin d'une réflexion de longue date sur les aspects délétères de la société française et sur les responsabilités des uns et des autres. Nous en sommes là, un Marc Bloch en moins.
"Jusqu'ici, tout va bien", disait la voix off d'un film de Kassovitz. Oui, jusqu'ici, tout va bien. A quoi sert de voir les choses arriver?