Je vous avais parlé de la bombe qu'aurait dû représenter un sondage fait à la demande du "Manifeste pour un débat sur le libre-échange", manifeste qui regroupe pas moins qu'Emmanuel Todd, Jacques Sapir et Jean-Luc Gréau parmi d'autres économistes ou intellectuels...
Une bombe, oui, parce que ce sondage, une première, mettait en évidence de façon manifeste et sans appel que les Français étaient opposés au libre-échange et favorables à des mesures protectionnistes, et cela de quelque bord politique qu'ils se revendiquent...
Eh bien l'AfP a été un maître dans l'art du désamorçage de cette bombe. Et comment a-t-elle fait? En titrant sur la première question du sondage qui était, comme l'a dit le sondeur lui-même lors de la conférence de presse de présentation du sondage, une question d'"ambiance". Le titre choisi par l'AFP? "Près d'un Français sur deux "révolté" par la situation économique". Nulle allusion à une remise en cause du libre-échange, rien sur l'assentiment majoritaire des Français au protectionnisme, rien qui pose une vraie question politique en somme...
Et le désamorçage a fonctionné....
Libération : http://www.liberation.fr/depeches/01012343679-pres-d-un-francais-sur-deux-revolte-par-la-situation-economique
Le Nouvel Observateur :http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/societe/20110616.AFP4413/pres-d-un-francais-sur-deux-revolte-par-la-situation-economique.html
L’expansion : http://lexpansion.lexpress.fr/economie/un-francais-sur-deux-revolte-par-la-situation-economique_257182.html
La Nouvelle République :http://www.lanouvellerepublique.fr/ACTUALITE/Economie/24-Heures/Pres-d-039-un-Francais-sur-deux-revolte-par-la-situation-economique
Certes, dans le coeur de la dépêche de l'AFP, on trouve la reprise des élements du sondage, et certains des journaux qui ont d'abord fait des articles qu'on pouvait trouver sur leurs sites Internet ont ensuite fait de bons articles ( voir http://manifestepourundebatsurlelibreechange.eu/?cat=18), mais tout de même....
Près d’un Français sur deux « révolté » par la situation économique (sondage)
PARIS, 16 juin 2011 (AFP) – Près d’un Français sur deux (48%) se dit « révolté » par la situation économique et sociale en France contre 30% qui se disent « résignés » et 13% « confiants », selon un sondage Ifop réalisé à l’initiative d’un collectif d’économistes.
Seuls un pour cent des Français sont « enthousiasmés » par la situation. Les autres (8%) affirment être « indifférents » ou ne se prononcent pas.
Ce sondage a été commandé par le « Manifeste pour un débat sur le libre-échange », un collectif d’universitaires et d’économistes qui se disent persuadés que l’un des enjeux essentiels de la campagne présidentielle de 2012 sera la place et la stratégie de la France dans la mondialisation.
L’un d’eux, Jacques Sapir, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, a ainsi estimé dans un entretien au Monde daté de jeudi que « les gouvernants savent très bien qu’il faudra revenir à une forme de protectionnisme, de patriotisme économique ».
Pour 64% des Français (contre 28%), l’ouverture économique des frontières et la question du montant des droits de douane devront être un sujet de la campagne présidentielle de 2012. Ces droits, que 65% des personnes interrogées voudraient voir augmenter, devraient l’être pour 80% d’entre elles, aux frontières de l’Europe et pour 20%, à celles de la France.
Une large majorité de Français jugent que l’ouverture des frontières de l’Europe et de la France à des produits indiens ou chinois, mais aussi l’inverse, a eu des conséquences négatives.
Cela a été le cas, selon 84% des sondés, pour les emplois en France, pour 78%, sur le niveau des salaires, pour 73%, sur les déficits publics, pour 57%, sur les prix à la consommation et pour 55%, sur les bénéfices des entreprises françaises.
73% des Français estiment que l’ouverture des frontières a eu un impact négatif sur l’environnement et la planète, 72% sur les salariés français, 71% sur la sécurité et la qualité des produits distribués en France et 68% sur les PME françaises.
D’une manière générale, 57% estiment que cette ouverture a été une mauvaise chose pour la France alors que 50% jugent qu’elle a été une bonne chose pour les pays en voie de développement et 54% pour les multinationales.
Trois Français sur quatre (75%) anticipent des effets négatifs de cette ouverture des frontières pour l’emploi dans les dix prochaines années contre 11% seulement qui en attendent des effets positifs et 7% qui estiment qu’elle n’aura pas d’effet particulier.
Sondage réalisé du 17 au 19 mai selon la méthode des quotas et auprès d’un échantillon de 1.012 personnes, représentatif de la population française de plus de 18 ans, interviewées par « questionnaire auto-administré » en ligne.